La tenture de l'Apocalypse d'Angers examinée sous toutes les coutures

Publié : 25 septembre 2016 à 8h17 par Rédaction Alouette

Mal accroch�e? Mal �clair�e? Trop empoussi�r�e? L'Etat a entam� une "autopsie" de la tenture de l'Apocalypse, plus grande tapisserie m�di�vale au monde, pour mesurer les effets d'une exposition permanente de ce chef d'oeuvre du XIVe si�cle dans une galerie du ch�teau d'Angers.



Command�e en 1373 par le duc Louis Ier d'Anjou, propri�t� de l'�tat depuis 1905, cette s�rie de tapisseries illustre sur 104 m�tres l'Apocalypse selon Saint Jean. Autrefois vifs, les rouges, bleus, verts et jaunes ont perdu de leur superbe � cause de leur exposition prolong�e � la lumi�re du jour, depuis les ann�es 1950 jusqu'au comblement des fen�tres de la galerie quarante ans plus tard.



Pour "voir dans quel �tat se porte cette vieille dame de plus de 600 ans", le minist�re de la Culture a lanc� une vaste op�ration de collecte de donn�es, comme "une autopsie qui doit permettre de d�cider ce qu'on fait comme restauration et garantir sa pr�sentation au public pendant longtemps", explique Herv� Yannou, administrateur du ch�teau.



Dans la galerie plong�e dans la p�nombre, deux �chafaudages aident � scruter "centim�tre carr� par centim�tre carr' cette oeuvre gigantesque courant sur deux niveaux. Il s'agit de relever et "quantifier tous les types de d�gradations", indiquent les restauratrices Suzanne Bouret et Montaine Bongrand, charg�es de faire ce diagnostic par la Direction r�gionale des affaires culturelles (Drac) des Pays de la Loire.



 



- 'Dans le squelette de la tapisserie' -



 



Les tapisseries sont-elles plus empoussi�r�es si elles sont dispos�es � l'entr�e ou � la sortie? Sont-elles plus d�grad�es si elles sont situ�es dans la partie inf�rieure ou la partie sup�rieure? Taux d'humidit�, temp�rature, encrassement, d�formations ou tensions li�es � l'accrochage, tout est mesur�.



Quatre tapisseries, choisies parmi quelque 70 pour ne pas d�shabiller totalement la galerie qui reste ouverte au public, ont �t� d�croch�es du mur et d�pos�es dans la r�serve du ch�teau o� elles sont d�doubl�es pour un examen � la loupe de la tenture, qui a la particularit� d'�tre r�versible.



Sur la table des "m�decins l�gistes", l'envers de la sc�ne repr�sentant "La moisson des �lus" et "Le Sommeil des justes" offre � ses observateurs "un choc de couleurs renversant", s'exclame Herv� Yannou, car ses couleurs d'origine n'ont pas subi les alt�rations de l'endroit.



"L'envers ne raconte pas que sa beaut� de couleurs, mais aussi les diff�rentes interventions qui ont eu lieu. Ici, la partie a �t� retiss�e, l�, on voit des techniques de repiquage avec de la laine neuve et des fils qui partent dans tous les sens", d�crit Suzanne Bouret, pench�e sur l'oeuvre, pendant que l'une de ses coll�gues passe l'aspirateur pour r�colter la poussi�re et la peser.



L�gu�e � la fin du XVe si�cle par le roi Ren� � la cath�drale d'Angers, la tenture de l'Apocalypse a par la suite connu une histoire mouvement�e. L'�v�ch� tente de s'en d�barrasser quand elle passe de mode au XVIIIe si�cle. Mutil�e et mise au rebut pendant la R�volution, elle est sauv�e dans les ann�es 1850 par le chanoine Joubert, qui la r�cup�re "en mille morceaux" et entreprend sa premi�re restauration, retrace Cl�mentine Mathurin, conservatrice � la Drac.



"Sur l'envers, on voit �norm�ment de choses qui ont �t� faites pour �tre cach�es. C'est comme une radio, (...) on est vraiment dans le squelette de la tapisserie", souligne Montaine Bongrand, qui esp�re, en comptant "le nombre de fils de cha�nes et le nombre de fils de trames (...) conna�tre la technique de r�alisation".



"Les techniques ne sont plus les m�mes qu'il y a 20 ans. On esp�re percer les secrets de ce chef d'oeuvre artistique et historique de la Guerre de Cent Ans, r�alis� en seulement sept ans", affirme Herv� Yannou. "O� a-t-elle �t� tiss�e? Dans combien d'ateliers? Par combien de personnes? C'est un myst�re...", lance M. Yannou, qui n'h�site pas � comparer la tenture de l'Apocalypse, encore largement m�connue du grand public, � une "Sixtine angevine".