Bretagne : un appel aux citoyens pour signaler les algues vertes
Publié : 21 août 2024 à 13h21 par Marie Piriou
En cette période de grandes marées, les pêcheurs à pied tombent sur des bigorneaux, ormeaux, moules et palourdes mais aussi sur des algues vertes. Un appel est lancé par quatre associations pour recenser les marées vertes dans le Finistère.
En Bretagne, les algues vertes existent depuis plus de 50 ans. Cet été, en raison de la météo, un échouage particulièrement important a été remarqué du côté de la baie de Morlaix, ce qui entraine l’effondrement de la biodiversité.
Quatre associations lancent un appel aux citoyens pour recenser les algues vertes, notamment l’association Sauvegarde du Trégor Goëlo Penthièvre qui avait déjà obtenu, l’année dernière, la condamnation du préfet des Côtes-d’Armor pour préjudice écologique en baie de Saint-Brieuc, un préjudice provoqué par les algues vertes.
Entretien avec le président de l’association Sauvegarde du Trégor Goëlo Penthièvre Yves-Marie Le Lay.
Quelques mots d’abord sur l’étendue des algues vertes en Bretagne. Qu’en est-il à ce jour ?
La situation est alarmante sur beaucoup de sites. C’est lié aux conditions météo qui ont été favorables avec une alternance de cycles de pluies, qui apportent les nitrates à la mer, de soleil et de chaleur. Donc les algues prospèrent, dans la baie de Saint-Brieuc mais aussi dans des sites assez inattendus comme la baie de Morlaix qui était jusqu’ici mise de côté.
4 associations bretonnes, dont Force 5 et l’association Sauvegarde du Trégor, lancent donc un appel pour demander aux citoyens de recenser les algues vertes dans le Finistère...
L’objectif c’est de recenser, à l’échelle de tout le département, des sites où l’on assiste en direct à l’effondrement de la biodiversité. Et pour cela, nous demandons la participation du public et des associations.
Deux indicateurs sont à prendre en compte : l’indicateur visuel, c’est-à-dire les algues mais aussi l’odeur, une odeur d’œuf pourri.
Les personnes qui nous indiquent les sites ne doivent surtout pas y aller. On ne peut pas exclure qu’elles tombent sur une poche d'hydrogène sulfuré et elles seraient alors intoxiquées brutalement. Nous, nous y allons avec un masque à gaz et un détecteur. Nous sommes équipés. Il ne faut pas mettre en danger sa santé.
Vous avez déjà eu des retours ?
Sur la baie de Morlaix, il y avait déjà des alertes lancées par les ostréiculteurs. A Combrit, j’ai un correspondant et j’attends qu’il m’apporte plus de précisions. Et puis un autre site a été repéré.
Quel est l’objectif de cette opération de recensement ?
Il y a une finalité : mettre en procès les responsables des marées vertes, c’est-à-dire les autorités de l’Etat et toutes les grandes institutions bretonnes et françaises qui réalisent des plans complètement inadaptés.
Ces responsables-là doivent être traduits en justice. On ne peut pas accepter qu’il y ait une dégradation de l’environnement à ce point, un effondrement de la biodiversité. Et s’ajoutent les risques sanitaires.
Donc les responsables de cette situation doivent rendre des comptes devant la justice. On peut parler de délit environnemental.
Un plan de 130 millions d’euros sur 5 ans, jusqu’en 2027, est prévu par la préfecture de Bretagne. C’est deux fois plus que le budget précédent. Quel est votre regard sur ce plan ?
Je ne peux dire qu’une chose : à côté de la plaque ! Il ne s’agit pas de dire que ces plans sont insuffisants, qu’il faudrait faire un petit peu plus, c’est qu’ils sont inadaptés ! Ils sont complètement à côté des enjeux.
Pour qu’il n’y ait plus de marée verte, et ce sont les scientifiques qui le disent, il faudrait que dans l’eau des rivières, il n’y ait pas plus de 5 à 10 milligrammes de nitrate par litre d’eau. C’est de l’eau de source, de l’eau qu’on achète en bouteilles. Si on a plus, on a des marées vertes !
Et vous pointez donc du doigt les extensions d’élevages intensifs, hors sol ?
Evidemment ! Ce n’est pas un procès à chaque exploitant, c’est un procès à tout un système. Ce ne sont pas des efforts qu’il faut faire. Ce sont des efforts adaptés.
D’un côté on dit aux agriculteurs "Faites des efforts !", et de l’autre côté on autorise les extensions d’élevages intensifs qui vont produire des excédents d’azote. C’est un non-sens ! Il faut arrêter cette espèce d’imposture. On prend une posture de lutte contre les marées vertes tout en laissant faire toutes les causes qui produisent ces marées vertes.