Rennes : une séance photo en hommage aux victimes de la route, initiée par le chef étoilé Yannick Alléno

Publié : 18 juin 2024 à 12h17 par Marie Piriou

À Rennes, les familles de victimes d’accidents de la route sont invitées à une séance photo ce mercredi 19 juin. Une initiative de l’association Antoine Alléno, du nom du fils du chef Yannick Alléno, décédé dans un accident de la route. Ces photos seront affichées ensuite à Paris.

La première séance photo est prévue à Rennes ce mercredi.

Crédit : Instagram | Association Antoine Alléno

À Rennes, une séance photo inédite est organisée ce mercredi 19 juin pour rendre hommage aux familles de victimes d’accidents de la route. C’est une initiative de l’association Antoine Alléno, pilotée par le chef étoilé Yannick Alléno, dont le fils est décédé dans un accident il y a deux ans. Entretien avec Yannick Alléno.


 


Votre association convie les familles de victimes d'accidents de la route à participer à une séance photo ce mercredi à Rennes pour un projet avec l'artiste JR. Pouvez-vous nous expliquer la genèse de ce projet baptisé "Alive" ?


On veut démontrer l’existence des co-victimes, auprès des violences de la route. Généralement, c’est vrai qu’on s’arrête à la seule et unique personne qui est partie ou qui est handicapée. Mais à côté de ça, des familles sont décimées. On veut vraiment montrer que la mortalité sur la route ne peut pas rester une fatalité. Il faut qu’on montre les dégâts que cela engendre.


 


Parmi ces victimes, il y a votre fils, Antoine...


Quand Antoine est parti en mai 2022, j’ai vu des choses que je ne souhaite à personne de voir. C’est-à-dire la non-assistance aux frères et sœurs, la violence administrative… On laisse finalement tous ces jeunes sans aide. Et moi, ça m’a vraiment perturbé. Je me suis dit que j’allais mettre ma notoriété au service de ces familles, qui n’ont pas la même visibilité que moi. C’est pour ça qu’il faut qu’on se réunisse pour cette œuvre-là, qu’on montre enfin à tout le monde que c’est toute une famille qui souffre, même les amis, les frères et sœurs, quand un enfant part.


 


Quel est l'objectif de cette action, concrètement ?


On va constituer une œuvre de portraits de membres de ces familles qui restent. On va coller ça à Paris sur le pont de l’Alma. On espère avoir 3.000 visages, ce qui représente à peu près le nombre annuel de dommages collatéraux. C’est 669 enfants qui partent en France par an, ce n’est pas rien. C’est aussi 4.000 morts sur la route. On va symboliser l’effacement de la mémoire, puisqu’à la fin de la journée, l’œuvre sera décollée du pont. Mais tout ça sera fait avec les talents de JR. Donc, oui, c’est important qu’on soit tous ensemble.


 


Comment se déroulera cette première séance photo à Rennes ?


On aura une photographe qui va prendre les portraits. Chacun peut venir, avec un objet, un souvenir, la photo de leur enfant disparu, de leur frère ou sœur disparu. Il y a quelques exemples d’ailleurs sur le compte Instagram de l’Association Antoine Alléno. On va faire de très jolis portraits en souvenir de nos enfants qui sont partis trop tôt.


 


 

 


 


Un temps d'échanges avec vous et les familles est-il également au programme ?


Bien sûr ! On est là pour échanger. L’association qu’on a créée est là aussi pour donner assistance. On a déjà aidé 98 familles. On a une assistante sociale, un sociologue, des psychologues qui nous aident, des avocats qui peuvent prodiguer aussi des bons conseils. On a essayé de structurer parce que quand l’effroi arrive, on n’est pas préparé. Donc tout ça, nous l’avons mis en place pour vraiment, dès les premiers instants, donner de l’aide.


 


C’est important d’échanger et de ne pas se renfermer sur soi-même quand on est victime collatérale ?


C’est hyper important de ne pas rester tout seul. Souvent, quand ils perdent leur enfant, les parents sont dans une tristesse absolue. Et les enfants qui restent se trouvent dans une situation d’isolement. D’isolement social. Même à l’école, c’est difficile de dire qu’on a perdu son frère ou sa sœur. C’est difficile de dire : "Mon compagnon est parti hier, il n’avait que 23 ans". Donc, oui, c’est important d’échanger. On doit se mobiliser pour entamer enfin une décrue de ces enfants morts sur la route et qui, je le rappelle, représentent l’avenir de notre pays.


 


Pourquoi avoir opté pour la ville de Rennes pour cette première séance photo ?


Parce que le Grand Ouest est aussi très touché. On commence par Rennes et on va ensuite faire le tour de France (Nantes, Angers et Bordeaux notamment). Ce qu’on veut vraiment, c’est aller à la rencontre des familles endeuillées.


 


Est-ce qu'il reste encore quelques places pour cette séance photo ?


Il faut nous contacter via l’Association Antoine Alléno, à travers le site Internet : www.associationantoinealleno.fr. Il y a un petit formulaire à remplir. Il reste des places et de toute façon, on va prendre le temps pour tout le monde.


 


L'œuvre artistique de JR sera exposée où et quand ?


Elle sera exposée à Paris au pont de l’Alma qui est symbolique pour nous. Antoine est décédé au pied du pont de l’Alma. Nous n’avons pas encore la date, nous attendons d’avoir tous les portraits pour pouvoir faire le collage. Les pompiers seront avec nous. C’est un élan national, un élan citoyen que nous essayons d’imprimer. Je pense qu’il est très important que toutes les familles répondent présentes.


 


Entretien retranscrit par Mikaël Le Gac