Châteaubriant : le salarié qui avait dénoncé Castel Viandes devant les prud’hommes

Publié : 16 février 2024 à 13h03 par Dimitri Coutand avec AFP

Un ex-salarié du groupe Castel Viandes, congédié après avoir dénoncé des violations de règles sanitaires dans un abattoir de Châteaubriant (Loire-Atlantique) par la suite condamné par la justice pour pratiques non conformes, a contesté, ce jeudi 15 février, en appel son licenciement devant les prud'hommes.

Crédit : capture d'écran | Google Maps

Pierre Hinard était employé en tant que responsable qualité par Castel Viandes lorsqu'il avait informé, en décembre 2008, les services vétérinaires que le groupe pratiquait la "remballe", autrement dit le recyclage de viande avariée issue d'invendus.


L'après-midi même, M. Hinard était convoqué par sa direction et mis à pied, avant de faire l'objet quelques jours plus tard d'une procédure de licenciement pour "insuffisance professionnelle", ont rappelé ses avocats lors d'une audience devant la cour d'appel à Rennes.


En première instance en 2019, le conseil des prud'hommes de Nantes avait jugé que la procédure de licenciement visant M. Hinard était conforme et ce dernier avait donc fait appel.


"Le fait pour un employeur de trouver tout d'un coup que son salarié a des insuffisances après que celui-ci a lancé une alerte est malheureusement fréquent", a estimé jeudi Me Eva Joly. L'ancienne députée européenne écologiste demande notamment que son client bénéficie de la protection accordée par la loi aux lanceurs d'alertes, estimant qu'il en remplit tous les critères.


A la suite de dénonciations faites par Pierre Hinard à la gendarmerie en 2012, une enquête judiciaire avait été ouverte et avait abouti à un procès, à Nantes en 2022.


 


Le PDG de Castel Viandes condamné en 2022


Le tribunal correctionnel avait condamné le PDG du groupe Castel Viandes, Joseph Viol, à six mois de prison avec sursis et 10 000 euros d'amende pour tromperie sur la qualité d'une marchandise et mise sur le marché de produits d'origine animale préjudiciables à la santé. La société, qui fournissait des groupes comme McDonald's ou Auchan, avait été quant à elle condamnée à 40 000 euros d'amende pour les mêmes chefs.


"Avec ce jugement devenu définitif, on a la confirmation que Pierre Hinard a effectivement alerté les services vétérinaires", une "preuve indiscutable" que la dénonciation était fondée et était "à l'origine de son licenciement", a plaidé Me David Lemercier.


L'avocate de Castel Viandes, Me Marie-Pascale Vallais, a réfuté ces arguments, assurant que ce licenciement était motivé uniquement par des "carences" et manquements du responsable qualité, qui n'avait selon elle à aucun moment alerté sa direction sur d'éventuels problèmes sanitaires dans l'abattoir.


"C'est un dossier qui n'aurait pas lieu de faire la Une des journaux ni de remplir les salles d'audience sans la volonté de Pierre Hinard de se draper dans un rôle de chevalier blanc", a-t-elle affirmé.


 


"Ils ont explosé ma carrière professionnelle"


La Cour d'appel des prud'hommes a mis sa décision en délibéré au 10 avril.


En marge de l'audience, M. Hinard a indiqué avoir porté plainte en janvier dernier contre son ex-employeur, qu'il accuse de diffamation et faux témoignages à son encontre. Il cite notamment des "accusations de harcèlement sexuel totalement inventées" qu'il affirme avoir découvertes en ayant accès au dossier pénal.


"Ils ont explosé ma carrière professionnelle", estime Pierre Hinard, qui est devenu éleveur de bovins bio indépendant après son licenciement.