Finistère : d'anciens élèves dénoncent un "Bétharram" breton

Publié : 12 mars 2025 à 8h06 par Marie Piriou avec AFP

Près de Brest, d'anciens élèves du collège Saint-Pierre ont formé un collectif pour dénoncer des violences physiques systématiques subies durant leur scolarité dans les années 1970. Ils décrivent un climat de violence avec des coups portés par la direction et les enseignants.

Violence enfant

Crédit : Illustration Envato - DR

"Tout était propice à des coups" : d'anciens élèves d'un collège catholique, près de Brest, se sont regroupés en collectif pour dénoncer les violences physiques systématiques dont ils ont fait l'objet durant leur scolarité.


 


"J'ai jamais oublié, ni digéré", lâche Joël Lagadec, 67 ans, élève de 1969 à 1972 du collège Saint-Pierre, surnommé "le bagne" par ses anciens élèves, et situé sur la commune du Relecq-Kerhuon.


Le directeur de l'établissement ? "Un fou furieux qui montait sur les tables pour donner des coups de pied aux élèves", décrit-il.


Les enseignants ? "Des curés pervers", des "psychopathes" qui "se déchaînaient" au moindre chuchotement et à la moindre mauvaise note, ajoute M. Lagadec, décrivant des "coups de poing dans l'épaule, là où ça ne laisse pas de trace".


 


"Ça frolait la barbarie"


"Les techniques utilisées étaient les mêmes que pour les animaux domestiques : on frappe, on fouette", poursuit Frédéric B., 64 ans, qui a fréquenté le collège Saint-Pierre de 1974 à 1977 après avoir été scolarisé à Notre-Dame-de-Bétharram de 1970 à 1972.


Contrairement à Bétharram, "à Saint-Pierre, c'était le personnel pédagogique, une bande de tarés, qui cognait : ça frôlait la barbarie", dit-il.


C'est d'ailleurs l'affaire de Bétharram qui a conduit les anciens de Saint-Pierre à créer un collectif, qui comptait 79 membres mardi, selon Frédéric B.


Des témoignages affluent chaque jour, suite aux articles parus dans Le Télégramme et Ouest-France. Dans l'un d'eux, reçu mardi, un ancien élève raconte avoir été "traîné par les cheveux au tableau pour des leçons mal acquises" ou décrit des "claques aux élèves jusqu'au saignement de nez", indique encore Frédéric B.


 


Objectif : des excuses et faire reconnaître le statut de victime


Les faits étant prescrits, les membres du collectif espèrent "faire reconnaître leur statut de victime" et obtenir des "réparations". "On voudrait des excuses a minima", dit M. Lagadec.


Après une fusion avec un autre établissement, le collège Saint-Pierre est devenu Saint-Jean-de-la-Croix à la fin des années 80. Dans un message aux parents et élèves diffusé fin février, la direction actuelle du collège a assuré n'avoir "plus aucun lien avec ce que fut Saint-Pierre autrefois" et condamner "avec la plus grande fermeté tout acte de violence qui aurait pu se produire par le passé".


Dans un entretien à La Croix ce mercredi, Alain Esquerre, le fondateur du collectif des victimes de Bétharram, dit son sentiment d'avoir "ouvert une boîte de Pandore sur les violences physiques et sexuelles dans les établissements confessionnels".


Jugeant l'afflux de témoignages "très inquiétant" et signe d'un "dysfonctionnement généralisé de nombreux établissements privés", M. Esquerre juge nécessaire de "créer une entité pour répertorier tous ces faits".


Il plaidera également pour l'octroi aux victimes d'un statut "qui donnerait accès à des soins gratuits, des thérapies", lors d'une rencontre avec la ministre de l'Education nationale Elisabeth Borne le 20 mars.