4 ans après l'assassinat de Samuel Paty, 8 complices présumés jugés
4 novembre 2024 à 8h10 par Joséphine Point avec AFP
Le procès va durer un mois et demi.
Sept hommes et une femme, accusés d'avoir contribué à la campagne de haine ayant conduit à l'assassinat le 16 octobre 2020 de Samuel Paty, professeur d'histoire-géographie de 47 ans à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), sont jugés à partir de ce lundi 4 novembre devant la cour d'assises spéciale de Paris. Le procès est prévu jusqu'au 20 décembre.
L'assassinat de Samuel Paty - survenu en plein procès des attentats du 7 janvier 2015 contre la rédaction de Charlie Hebdo - a constitué une onde de choc dans la société française.
L'audience présidée par Franck Zientara, un magistrat chevronné qui a notamment dirigé le procès de l'attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray, doit débuter à 10h ce lundi 4 novembre dans la salle des "grands procès" du palais de justice de Paris, là où se sont déroulés ceux des attentats du 13-Novembre et du 14-Juillet à Nice.
L'assassin, Abdoullakh Anzorov, un jeune islamiste radical russe de 18 ans d'origine tchétchène, bénéficiaire du statut de demandeur d'asile en France, sera le grand absent du procès : il a été tué par la police peu après avoir poignardé et décapité le professeur.
Accusés d'avoir contribué à la campagne de haine contre Samuel Paty
Deux jeunes amis de l'assaillant doivent répondre de "complicité d'assassinat terroriste", un crime passible de la réclusion criminelle à perpétuité. Les six autres accusés, dont trois, sous contrôle judiciaire, comparaissent libres, sont jugés pour participation à une association de malfaiteurs terroriste criminelle, un crime passible de 30 ans de réclusion criminelle.
Parmi les accusés figurent Brahim Chnina, Marocain de 52 ans, le père de la collégienne de 13 ans qui avait affirmé de façon mensongère - elle était absente au cours - que Samuel Paty avait demandé aux élèves musulmans de quitter sa classe avant de montrer des caricatures de Mahomet, et Abdelhakim Sefrioui, un militant islamiste franco-marocain de 65 ans. Ces deux hommes, en détention provisoire depuis quatre ans, ont massivement relayé les mensonges de l'adolescente sur les réseaux sociaux dans le but, selon l'accusation, de "désigner une cible", "susciter un sentiment de haine" et "ainsi préparer plusieurs crimes". Ils sont tous deux accusés de participation à une association de malfaiteurs terroriste.
La fille de Brahim Chnina et cinq autres ex-collégiens ont été condamnés l'automne dernier à des peines allant de 14 mois avec sursis à deux ans dont six mois ferme à l'issue d'un procès à huis clos devant le tribunal pour enfants.
Une complicité contestée
Les deux amis d'Anzorov, Naïm Boudaoud, 22 ans, et le Russe d'origine tchétchène Azim Epsirkhanov, 23 ans, qui encourent la réclusion criminelle à perpétuité pour complicité d'assassinat terroriste, sont notamment accusés d'avoir accompagné Anzorov dans une coutellerie de Rouen la veille de l'attentat.
"Près de trois ans d'information judiciaire n'ont jamais permis d'établir que Naïm Boudaoud avait connaissance du moindre projet criminel de l'assaillant", déclarent Mes Adel Fares et Hiba Rizkallah qui contestent "la complicité" de leur client.
Samuel Paty, "esseulé et apeuré" peu de temps avant son assassinat
Le procès sera aussi l'occasion d'évoquer la figure de Samuel Paty, un homme "esseulé, apeuré, aux abois", selon les magistrats instructeurs.
"Je suis menacé par des islamistes locaux", écrit-il à ses collègues le 10 octobre 2020, quatre jours après son cours sur la liberté d'expression. À aucun moment, l'enseignant menacé ne bénéficiera d'une protection policière.
Lui qui a l'habitude de rentrer chez lui à pied demande à des collègues de le raccompagner en voiture les quatre jours qui précèdent son assassinat. Sauf le 16 octobre, veille de vacances scolaires, où aucun enseignant motorisé n'est disponible.
Triste symbole du sentiment d'insécurité qui l'habitait, un dérisoire marteau a été découvert dans son sac à dos après son assassinat.